Depuis un peu plus d’une semaine la France vit sur un petit nuage, telle la belle endormie elle est aux anges. La raison de cet état euphorique tient bien sûr aux Jeux Olympiques qui jour après jour nous apportent un concentré d’émotions intenses. On se plaît à rêver, et si cela pouvait durer ? Hélas la parenthèse enchantée va bientôt se refermer et nos compatriotes vont retrouver leur train-train quotidien dans la torpeur de l’été.
La France a désormais ses héros, identifiables par leur prénom : Antoine (Dupont), Teddy (Riner), Felix (Lebrun) Cassandre (Beaugrand) et surtout Léon (Marchand), le roi Léon. Sans oublier les autres, tous les autres, hommes et femmes, ces immenses athlètes qui nous ont fait rêver dans les disciplines de l’équitation du tir au pistolet, du tir à l’arc, du BMX, du Kite-foil, etc. Le suspens a été souvent insoutenable jusqu’au bout de la nuit et fait exploser nos tensiomètres. Et que dire des sites olympiques, tous plus majestueux les uns que les autres, du Trocadéro, au pied de la Tour Eiffel, pour le beach-volley, au Grand Palais pour l’escrime, en passant par le château de Versailles pour l’équitation. Il y a eu des vedettes, des stars individuelles, et puis les sports d’équipe : le foot, le basket, le hand, où les joueurs, masculins et féminins confondus, ont accompli des prouesses. Que dire aussi du club France où les médaillés se produisaient chaque jour devant une foule enthousiaste, endiablée alternant entre « Marseillance » et clapping après qu’un revenant de la natation, Florent Manaudou, ait donné le tempo avant de se lancer dans le bassin et d’obtenir une médaille de bronze. Il ne manquait plus à ce tableau idyllique et à notre bonheur que quelques déclarations d’amour et demandes en mariage, ce qui fut fait en direct sur la piste cendrée du stade de France, pour que la France romantique montre son visage éternel et fasse résonner en nous « l’Hymne à l’amour » d’Edith Piaf.
Durant toutes ces journées les français ont eu le regard tricolore, l’iris bleu et la cornée blanche et rouge, rouge de fatigue et de l’ivresse des victoires de leurs Héraults. Ils ont chanté comme jamais l’hymne national au point de s’égosiller et d’en perdre la voix, ne manquait que notre célèbre coq gaulois et son « Cocorico ». Dans les stades olympiques, sur les différents sites, innombrables sur les gradins, ils ont communié ensemble, avec la même ferveur que s’ils assistaient à la célébration d’un office. Et ils ont soutenu leurs athlètes et leurs équipes au point d’avoir mérité quelques poussières de médailles d’or, d’argent et de bronze. Nos sportifs l’ont eux-mêmes reconnus, ils ont été soutenus au-delà de l’imaginable, comme jamais ils n’auraient osé l’espérer. Du coup ils se sont sentis galvanisés, portés par cette vague géante venue de Tahiti sur laquelle un petit prince polynésien a surfé avec brio. Tous ont vécu des moments mémorables, gravés à jamais dans les mémoires. La France a fait honneur aux Jeux d’Athènes avec cette arrivée de la flamme olympique à Marseille sur un voilier prestigieux et sa traversée d’innombrables villes et villages avant de s’exposer avec la superbe vasque lumineuse au-dessus des Tuileries, clin d’œil aux frères Montgolfier et au premier vol en ballon aérostatique en 1783. Pour un peu, avec tous ces princes, princesses de l’équitation, du tennis de table, du volley-ball, et autres ainsi que ces rois et reines du judo, de la natation, du BMX, etc. on aurai cru revivre l’époque de la monarchie, ou un épisode du film de Sacha Guitry « Si Versailles m’était conté ». La France était redevenue un royaume, au sens premier du mot et les yeux du monde entier ont été fixés sur Paris, qui en faisant briller dans la nuit les anneaux de l’olympisme, et de ses valeurs, a été le phare de l’humanité durant cette quinzaine. Paris gorgé de touristes, nationaux et étrangers qui ont eu le sentiment de vivre hors du temps un spectacle grandiose, féérique, magique.
Il y a eu bien sûr la déception pour certains sportifs et la désillusion du public à l’annonce de telle ou telle contre-performance, mais même le baromètre, après une météo inaugurale pluvieuse, avait pointé sa flèche sur « Très sec » faisant de Paris non seulement la plus belle capitale du monde mais de cette olympiade des temps modernes une magnifique fête populaire et festive. Les français en avaient oublié les avatars politiques pour seulement vibrer, s’enflammer et rêver. Ils ne voulaient retenir que les propos du sélectionneur des bleus Thierry Henry : « La France est forte quand elle est unie, et notre pays est beau » comme le prouvent la moisson de médailles, un record, et la découverte d’une nouvelle génération de sportifs talentueux, généreux, fiers de représenter la France et ne cachant pas leur reconnaissance à ces français qui les ont soutenus avec la foi du charbonnier. Malheureusement, après cet intermède enchanté des JO et des Jeux para olympiques, l’adrénaline une fois retombée, la vie va reprendre son cours normal, avec ses tracas habituels, ne restera qu’un peu de spleen dans les cœurs.
Les lampions de la fête vont s’éteindre mais les français ne sont pas prêts d’oublier « le bel été 2024 », que la France a offert à la planète entière le meilleur d’elle-même, la plus belle image de ses monuments historiques et le plus magnifique des spectacles sportifs, dans cet écrin unique et sublime qu’est Paris. En repensant à la folle période que nous venons de vivre, nous avons tous envie de dire comme Lamartine, dans son fameux poème « Le lac » : Ô temps suspends ton vol ! et vous heures propices, suspendez votre cours ! Laissez-nous savourer les rapides délices des plus beaux de nos jours ! «