Catégorie : A paraître

Un écrivain enterre un mot chaque jour.

A l’heure où je m’apprête à publier à la mi-décembre 2024, mon dix-septième ouvrage « Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », je mesure davantage le chemin parcouru depuis vingt-quatre ans, date de sortie de mon premier livre « Le Prix du sang bleu ». Après douze romans, deux biographies historiques, et trois ouvrages de géopolitique,  auxquels il faut ajouter sept ou huit autres livres comme auteur « fantôme »,  j’ai réalisé mon rêve d’enfant, devenir écrivain. Et comme disait un certain Roger Couderc, commentant la victoire de l’équipe de France de rugby lors d’un match du tournoi des cinq nations « après cela, on peut mourir ».

Tant il est vrai, qu’arrivés à un certain âge nous sommes tous en sursis, confirmant que la vieillesse est un privilège qui n’est pas accordé à tout le monde, avant, comme le disait le général, d’être un naufrage. Au demeurant, depuis quelques temps déjà, lorsque je commence l’écriture d’un nouveau roman je ne suis jamais sûr de le terminer, et un jour viendra, nécessairement, où l’ouvrage restera sur le métier, inachevé. Tel est notre sort commun. Etrangement, au moment où mon manuscrit « Claude Hervé et le MSB » est sur le point d’être mis en rayons dans  les librairies, un souvenir m’est revenu en mémoire, et un sentiment de tristesse m’a envahi.

Le souvenir se rapporte à un moment de mon service militaire alors que j’avais été admis à l’hôpital militaire « Percy » à Clamart, en région parisienne. Le jeune gaulliste que j’étais connaissait de nom cette localité car quelques années plus tôt, le général de Gaulle y avait été victime d’un attentat de la part d’anciens officiers de l’OAS. Il n’avait dû qu’à sa baraka légendaire d’avoir la vie sauve. Durant trois mois, j’allais subir là une batterie d’examens relatifs à une bronchite chronique que je traîne comme un boulet depuis mon enfance. Au même moment, dans une aile différente de cet établissement de santé prestigieux des armées, des chirurgiens s’efforçaient de réaliser des greffes de la peau et de sauver la vie de plusieurs ingénieurs de chez Kodak, très grièvement brûlés. Trois mois, c’est long, mais ils passèrent à la vitesse de l’éclair car j’avais été affecté, comme patient, à la bibliothèque de l’hôpital et chaque jour avec un petit charriot je faisais le tour des différents services pour offrir des livre aux malades qui le souhaitaient. Il y a pire comme corvée ! Après la bibliothèque de l’université, celle de Percy fut mon deuxième paradis sur Terre. Gaston Bachelard n’a-t-il pas écrit : « Le paradis, à n’en pas douter, n’est qu’une immense bibliothèque ».  Les rumeurs circulant vite dans un lieu aussi confiné on avait aussi appris qu’avant d’endosser l’uniforme kaki, j’avais entamé une carrière de journaliste et que je devais être affecté au SIRPA (le service d’information et des relations publiques de l’armée). Sauf que par suite d’une infection, peu après mon incorporation, j’avais échoué à Percy. Du coup, plusieurs de mes voisins de chambrée, qui maîtrisaient à peine la langue de Molière, me demandèrent d’écrire des lettres d’amour à leur dulcinée, ce que j’acceptai après un temps d’hésitation, en échange de paquets de cigarettes (alors que je ne fumais pas). Je mis tout mon cœur à l’ouvrage, au point que les destinataires étaient toutes énamourées en lisant les missives en question et que leurs réponses emplissaient de joie mes camarades conscrits qui s’expliquaient mal cette inflation de tendresse à leur égard.  Il faut dire que je n’écrivais pas sous leur dictée mais que je rédigeais chacune d’elle comme si je m’adressais à ma propre petite amie. Je compris au bout d’un moment qu’il fallait que la plaisanterie s’arrête car en lisant à travers les lignes je devinai qu’elles étaient sur le point de réaliser un transfert affectif sur ma personne. Heureusement, la décision des autorités militaires de me réformer, mit un terme à ces échanges épistolaires singuliers. Je réalise aujourd’hui seulement que mon plaisir d’écrire et mon imagination fertile sont sans doute nés là, à l’hôpital Percy, non pas au service « maternité », mais « pneumologie ».

Quant au sentiment de tristesse, il tient tout simplement au fait que mon père est trop tôt disparu pour avoir lu le premier livre que j’ai écrit, et qu’il serait sans doute fier de moi en voyant le chemin parcouru. La maladie l’a privé de cette joie et moi d’un sentiment de reconnaissance envers lui. Il n’aura jamais su, non plus, les nombreux reportages que j’ai effectués à travers le monde et pourtant je suis sûr qu’il aurait envié cette vie aventureuse, sur les théâtres d’opérations militaires comme dans les salons d’ambassade, au Vietnam comme à Cuba, au Liban comme au Kosovo,  en Somalie comme au Cambodge, au Tchad comme en Bosnie ou en Albanie, mais aussi lors de la première guerre du Golfe en Arabie Saoudite ou encore en Russie, au Mali, en Côte d’Ivoire et en Afrique du Sud. J’étais  un reporter aux semelles de vent qui vivait une existence digne des bandes dessinées et il a tout ignoré de ma part d’ombre et de lumière. Nous avions l’Histoire en commun, mais notre histoire commune fut trop courte. Finalement, nous sommes restés des étrangers l’un pour l’autre, alors que j’aurais tant aimé que nous soyons complices. Quant à ma mère, je n’ai d’elle aucune odeur de peau, aucun souvenir d’allaitement maternel, aucune trace de lèvres sur le front de l’enfant qui s’endort, aucune caresse pour le bercer, aucun regard. Et pour cause, je ne l’ai pas connue, si l’on excepte une rencontre post-mortem, dans un petit cimetière, des décennies plus tard. Qu’aurait-elle pensé d’avoir un « fils écrivain », alors qu’elle ne m’avait pas élevé comme un simple fils ? J’étais venu au monde parce qu’une femme avait aimé un homme, avant qu’elle ne reparte sans avoir eu le temps de m’aimer moi, pour elle j’étais un cœur de trop. Je leur dédie ce livre, petites étoiles perdues dans l’immensité de l’univers.

Certains prétendent que l’écriture est l’expression d’un manque, la traduction d’une fêlure, auquel cas ce n’est pas d’une bronchite chronique dont je devrais souffrir, mais plutôt de ces fractures à l’âme, autrement plus douloureuses et cruelles. Léon-Paul Fargue écrivait « qu’un bon écrivain est celui qui enterre un mot chaque jour« .  Si j’en parle aujourd’hui c’est parce que ma cuirasse est faite d’un métal éprouvé par ses fragilités, et que ces blessures n’ont pas cicatrisé, et ne cicatriseront jamais.

Avec l’écriture de ce livre de 290 pages : « Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », j’ai décidé de mettre le doigt sur « pause » dans l’imaginaire des romans, thrillers, et autres uchronies qui constituent mon quotidien et j’ai repris mon bâton, non de pèlerin, mais de journaliste, afin de recueillir de nombreux témoignages des principaux dirigeants des collectivités locales, d’élus, de hauts fonctionnaires, de responsables sportifs du MSB, etc. afin de découvrir la personnalité méconnue de celui qui, durant seize ans, a présidé aux destinées d’un des plus grands clubs de basket français. Je l’ai fait, dix-huit ans après avoir écrit une biographie : « Claude Hervé, le roman d’une vie », c’est donc un nouveau livre-document, un livre-enquête sur une personnalité fascinante que je connais depuis les années 1990, que je livre aujourd’hui aux lecteurs. Puissent-ils y trouver le même plaisir à le lire, que j’en ai eu à l’écrire.

A la veille des fêtes de fin d’année, j’ai une recommandation à vous faire : « Offrez des livres ! Ils s’ouvrent comme des boîtes de chocolat et se referment comme des coffrets à bijoux ».  (Bernard Pivot)

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

 

NB : 1) L’ouvrage « Claude Hervé, le roman d’une vie » est toujours disponible à la Maison de la presse de la galerie marchande du magasin Leclerc « Les Maillets Fontenelles » route de Bonnétable au Mans.

2) Je dédicacerai, avec Claude Hervé, mon dernier ouvrage  » Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », samedi matin 14 décembre 2024, de 10 heures à 12 heures, au Centre Leclerc des Maillets Fontenelles. Je serai heureux de vous accueillir.

« Ces Messieurs de Heidelberg » : 10ème roman pour 20 ans d’écriture !

2000 : « Le Prix du Sang Bleu »
2021 : « Ces Messieurs de Heidelberg »

Entre ces deux dates, plus de vingt ans se sont écoulés et ce roman à paraître au printemps est mon dixième ! Entre l’ébauche d’une idée, la conception d’un plan de travail, les recherches, l’écriture et l’édition d’un livre deux ans auront été nécessaires à la parution de chacun d’eux. C’est une bonne moyenne.

Avec « Ces Messieurs de Heidelberg » je plonge à nouveau le lecteur dans l’univers du troisième Reich, après « Adolf H », mais cette fois-ci dans une période post-nationale socialiste avec cette question : Que sont devenus certains anciens dirigeants nazis et comment se sont-ils recyclés dans l’Allemagne d’après-guerre ?

C’est à cette interrogation que vont devoir répondre les deux héros de ce roman, Karen une jeune journaliste allemande et Alexandre un reporter français, qui en réveillant les fantômes du passé vont rendre fou de rage les membres d’un groupuscule d’extrême-droite. En décrivant cette traque d’anciens officiers SS j’ai aussi voulu interpeler les lecteurs sur les risques de résurgence du nazisme en Europe. Et à voir la montée actuelle des populismes la fiction risque bien d’être rejointe par la réalité plus tôt que prévu.

Il me reste à souhaiter que les lecteurs réservent le meilleur accueil à cette dernière production sortie de mon imagination, m’encourageant ainsi à poursuivre cette aventure. En confidence je peux bien vous l’avouer, un autre projet est déjà en route, tout aussi … romanesque.

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