Emanuel Macron, Olaf Scholz, et quelques autres dirigeants politiques européens peuvent méditer ce matin la fable d’Esope « l’enfant qui criait au loup ». Cela fait des années, élections après élections, que l’on voyait monter l’extrême-droite inexorablement et se rapprocher dangereusement des marches du pouvoir. Et bien aujourd’hui c’est fait, Marine Le Pen est à la porte de l’Elysée, les avertissements n’auront servi à rien !

Et la grande différence avec les années 1930 c’est que cette poussée de fièvre n’affecte pas seulement l’Allemagne (où aujourd’hui l’Afd arrive en deuxième position) mais qu’elle a gagné la France, l’Autriche, la Belgique, l’Italie, etc. En 2024 on ne peut pas dire que le danger vient d’Outre-Rhin, c’est désormais toute une partie du continent européen qui est gangrenée par les idées d’extrême-droite, qu’on qualifiait hier de peste brune.

La faute à qui ? A tous les gouvernements, de gauche et de droite confondus qui se sont succédés depuis des décennies et n’ont pas su tenir compte des voyants qui passaient au rouge, des signaux d’alerte successifs, tels que la crise des gilets jaune, les manifestations sur les retraites, les émeutes urbaines, etc. ici-même dans l’Hexagone. Tous, sont restés sourds et aveugles à la grogne populaire qui montait crescendo et aux mouvements protestataires de gens de plus en plus nombreux qui exprimaient leur ras-le-bol et disaient pour commencer « Assez, c’est assez » pour finir par « Trop, c’est trop » !

Et comme dans la fable d’Esope, où l’enfant lance de fausses alertes pour effrayer les grandes personnes, l’alerte est devenue un jour véritable mais n’a pas été prise au sérieux. Contrairement au régime dictatorial la démocratie, grâce aux consultations électorales régulières et autres referendums, offre des soupapes de sécurité qui permettent aux citoyens d’exprimer leur mécontentement sans remettre fondamentalement en cause le système, à l’image de la cocotte-minute qui se met à siffler lorsque qu’elle entre en ébullition. A défaut d’en tenir compte le couvercle républicain saute et c’est ce qui vient de se produire ! Nous avons été gouvernés en Europe par des pompiers pyromanes qui n’ont pas su mesurer les effets néfastes de la mondialisation sur les peuples, les lois et règlements tyranniques de la commission de Bruxelles sur les entrepreneurs et les agriculteurs et l’appauvrissement des particuliers par suite notamment des hausses successives des coûts de l’énergie (gaz et électricité). Les français ne sont pas anti-européens, comme les résultats de l’élection pourraient le laisser croire, ils sont contre une administration bruxelloise omniprésente, tentaculaire, qui envahit leur vie quotidienne chaque jour un peu plus, alors que dans le même temps l’Etat français est de plus en plus souvent aux abonnés absents dans les domaines essentiels que sont l’éducation, la sécurité, la santé, etc. Ce dimanche, ils n’ont pas demandé « moins d’Europe », mais une « meilleure Europe », en même temps qu’une nation française qui ne cesse d’abdiquer continuellement, à l’exemple des nombreuses zones de « non droit » qui ont envahi nos villes et nos quartiers. Notre sang gaulois n’a fait qu’un tour et l’esprit des lumières a envahi les bureaux de vote, comme pour nous rappeler cet échange prémonitoire entre Louis XVI et le duc de la Rochefoucauld un certain 14 juillet 1789  : « Est-ce une révolte ? » – « Non, Sire, c’est une révolution !  » Preuve de la gravité de la situation, notre monarque républicain Emmanuel Ier a, sitôt connus les résultats de l’élection, décidé la dissolution de l’Assemblée nationale. Coup de colère ou coup de génie, l’avenir nous le dira.  Face à cet avatar électoral il ne manquait plus que la remarque de Marie-Antoinette « Ils n’ont pas de pain ? Qu’ils mangent de la brioche ! »

En votant comme ils l’ont fait dimanche en France, en Autriche, en Allemagne ou en Italie, ils ont dit aussi qu’ils en avaient assez de l’arrogance de leurs gouvernants, sourds à leurs revendications, qu’ils estiment légitimes, indifférents à leurs souffrances et leur fin de mois difficile. Ils ont exprimé leur révolte quant à une immigration sauvage incontrôlée et une insécurité grandissante, à une société qui se délite chaque jour davantage, un déclassement dans la société et un sentiment de dépossession de leur identité.

En clair, ils ont réclamé de ceux qui nous gouvernent qu’ils replacent l’église au centre du village et que face au dérèglement général ils remettent les pendules à l’heure. Est-ce trop demander ? Et surtout n’est-il pas déjà trop tard ?