Pour avoir voulu jouer les apprentis sorciers, Emmanuel Macron, en dissolvant l’Assemblée nationale dans le but de clarifier la situation, a obtenu précisément le contraire de l’objectif recherché. Jamais l’état politique du pays n’aura été aussi opaque, avec un hémicycle ingouvernable, à un moment où le monde est en ébullition et l’Europe à la dérive. Il a parié, il a perdu ! Et son pari manqué fait irrésistiblement penser au « Joueur » de Dostoievski qui, comme lui, a tenté le diable et s’est autodétruit.
Force est de se rendre à l’évidence, le « Nouveau Front Populaire » est, contre toute attente, le grand gagnant de la consultation des 30 juin et 7 juillet, avec 182 sièges, contre 163 à « Ensemble » et 143 à l’alliance RN-LR. Un retournement de tendance totalement inattendu qui s’explique par la création d’un front républicain initié au soir du premier tour afin de conjurer « le péril » de l’extrême-droite. Première conséquence de ce gloubi-boulga, la démission du Premier ministre Gabriel Attal. Désormais le roi est nu, et bien nu ! Le jeune homme capricieux, qui se voulait Jupiter, est redescendu de son trône, ou plutôt le peuple, véritable souverain Vox populi, vox Dei, l’a déchu et privé de son sceptre.
Jamais au cours de la Vème République une telle inconscience n’aura eu de telles conséquences. Et comble de l’ironie, celui qu’on présentait comme le « Mozart de la finance » va avoir en face de lui chaque semaine lors des questions orales au Parlement un certain François Hollande, celui-là même à qui il a infligé une sévère correction en 2017. L’homme aux sorties nocturnes en scooter et aux croissants chauds livrés au domicile de sa dulcinée Julie Gayet peut savourer sa revanche car, contrairement aux viennoiseries, celle-ci est un plat qui se mange froid. L’occupant du palais présidentiel va aussi devoir gérer l’individu incontrôlable qu’est Jean-Luc Mélenchon, le chef des insoumis plus « imperator » et plus « stentor » que jamais. Et nul doute que ce Fidel Castro, doublé d’un Hugo Chavez à la française lui réserve quelques chiens de sa nouvelle portée parlementaire. On entend déjà leurs premiers aboiements.
Nos partenaires européens vont quant à eux n’avoir que mépris pour ce chef d’Etat arrogant qui s’est pris les pieds dans le tapis d’une façon clownesque. Quant aux Poutine, Erdogan, Xi Jinping, etc. ils doivent exulter de joie, la France, qui hier encore était une grande nation, a été ravalée au rang de pays en voie de développement, criblée par une dette abyssale, et désormais face à de graves turbulences et un avenir des plus incertain. A quand la vente aux enchères publiques des reliques nationales, avant, qui sait, une hypothèque ou un nantissement sur notre arsenal nucléaire ? Les banquiers-prédateurs de Wall-Street, qui n’aiment rien tant que l’insolvabilité des débiteurs, sont là, prêts à dépecer notre souveraineté nationale et se répartir les morceaux de choix.
Nul doute que lundi 8 juillet le locataire de l’Elysée a dû se réveiller avec la gueule de bois et se demander s’il n’avait pas fait un mauvais cauchemar. Malheureusement pour lui la réalité l’a rattrapé et tous ses rêves fantasmés de marionnettiste se sont évanouis sous la pression électorale, et peut-être demain celle de la rue. Car cette élection n’a rien réglé, qu’il s’agisse de l’insécurité, de l’immigration ou du pouvoir d’achat et ce n’est pas l’actuelle composition de l’Assemblée nationale qui va accomplir un miracle. D’ailleurs la gauche, c’est bien connu, n’aime pas Dieu. La France, ce pays de droite, vient en effet, contre toute attente, de se donner une maîtresse de gauche et la pièce de boulevard dont nous allons être les spectateurs impuissants au cours des prochains mois, risque bien de connaître un dernier acte plus tragique que comique. Voici de qu’il en coûte de jouer avec le feu. Tôt au tard à trop s’approcher des flammes on se brûle les ailes, et d’ores et déjà le grand dessein d’Emmanuel Macron d’une France qu’il voulait façonner à sa botte à grands coups de 49.3 vient de se consumer sur le grill d’une dissolution aventureuse. Il rêvait de gloire, il n’aura semé que la discorde et fracturé un peu plus un pays déjà au bord de l’implosion.
Ainsi naissent et périssent les ambitions des hommes politiques qui ont le tort d’oublier qu’il n’y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne. Emmanuel Macron vient de l’apprendre à ses dépens, avant peut-être, demain, que le pays tout entier en fasse les frais.