Ce matin 26 avril 2025, en ce jour historique plus de 200 000 fidèles se sont réunis place Saint-Pierre et sur le parcours qu’a emprunté le cortège funèbre vers la basilique Sainte-Marie Majeure choisie comme dernière demeure par le pape argentin François. Il y a eu aussi des dizaines de présidents et de têtes couronnées présentes aux abords du Vatican pour rendre un dernier hommage au pape des pauvres et présenter leurs condoléances attristées. Sincères pour la plupart d’entre eux et pour d’autres moins.
Son appartenance à l’ordre des jésuites, partisans de la théologie de la libération à l’époque des dictatures sud-américaines, l’a porté naturellement aux côtés des plus démunis, des plus fragiles de nos sociétés. Et si cela a contribué à sa popularité au sein des classes populaires d’Europe, d’Asie, d’Amérique et d’Afrique cela n’a pas été toujours le cas, loin s’en faut, auprès des puissants de ce monde qui lui ont notamment reproché ses positions en faveur des migrants, mais pas que. On l’a aussi dénigré pour ses exhortations constantes appelant à la paix dans le monde, ainsi que sur des signaux contradictoires concernant l’homosexualité ou le divorce. Nul n’est parfait dans ce bas monde, même pas un pape.
François c’est l’anti-Trump capitaliste affairiste, égoïste, pour qui le mot solidarité c’est de l’hébreu. Mais chacun est dans son rôle si j’ose dire et peut-être que demain, en réaction, le conclave élira-t-il un pape conservateur qui représentera l’antithèse du défunt pontife. Le retour de balancier n’existe pas qu’en politique. Habemus papam ! Sans attendre ce moment cer Donald Trump et Volodymyr Zelenski, auquel se joindra Emmanuel Macron, se sont efforcés de bâtir des plans sur la comète dans le cœur même de la Basilique Saint-Pierre, à l’ombre du cercueil du Saint-Père. Celui-ci n’aurait sans doute pas désavoué une pareille initiative, le Vatican d’essence divine ne pouvant qu’encourager toute forme de dialogue, y compris, et surtout même, entre frères ennemis, car pour l’Europe et l’Ukraine l’Amérique n’est plus vraiment un allié. Ici, point d’humiliation semblable à celle offerte au monde en février dans le bureau ovale à Washington, sous peine de foudres célestes. L’excommunication pendait au nez du coupable. On ne connaîtra bien sûr jamais la teneur des propos échangés dans ce haut lieu de la chrétienté mais l’espoir fait vivre et on ne peut qu’espérer, qu’avec la bénédiction urbi et orbi de François, même post mortem, les trois hommes auront progressé sur le chemin d’un accord de paix entre l’Ukraine et la Russie. On peut imaginer que les voix célestes auront inspiré les trois hommes auxquels n’a pu se joindre le principal intéressé, Vladimir Poutine, objet d’une condamnation par la Cour pénale internationale, et susceptible d’être arrêté manu militari à l’intérieur des frontières de l’U.E. Une église, à postériori une basilique, est certes un lieu inviolable mais le problème c’est d’y entrer et d’en ressortir.
Il y a donc eu ce matin autour du cercueil une multitude de femmes et d’hommes noyés sous le chagrin d’avoir perdu leur pasteur, et des dirigeants à qui l’hypocrisie commandait de faire bonne figure et d’affecter une tristesse de circonstance. Des dirigeants qui lui ont reproché des s’être intéressé un peu trop au temporel et pas exclusivement au spirituel, et d’avoir ainsi empiété sur leur leur plates-bandes, en clair d’être sorti de son périmètre de chef de l’église romaine.
Ils ne sont pas nombreux pourtant à pouvoir prétendre, comme lui, gouverner près d’un milliard et demi d’êtres humains répartis sur l’ensemble du globe. Emmanuel Macron, à titre d’exemple, a déjà bien du mal à rassembler soixante millions d’individus dans un Hexagone. Cela situe le niveau de l’échelle et oblige à un peu plus de modestie.
Alors, sans doute, qu’un peu d’humilité siérait à ces hommes politiques qui hier l’ont contesté, dénigré, et qui ce matin vont verser des larmes de crocodiles devant sa dépouille. Ils ne devraient pas oublier que L’église a plus de deux mille ans d’existence tandis qu’eux ne font que passer, tel un courant d’air au niveau de l’Histoire, le temps d’un quinquennat ou deux, un peu plus pour les dictateurs, cela leur permettrait de relativiser un peu leur pouvoir.
Mais en sont-ils seulement capables, j’en doute fort.
Jean-Yves Duval, journaliste écrivain