Observer les manchots au pôle sud, voler quelques minutes autour de la Terre, telles sont les nouvelles lubies touristiques inédites pour gens fortunés disposés à payer à quelques centaines de milliers de dollars, voire quelques millions, pour éprouver le grand frisson et se distinguer des colonies de touristes qui envahissent le Mont-Saint-Michel, Venise où les îles Galapagos, à moins qu’ils ne choisissent une croisière sur un immeuble flottant.

Voici peu, on a ajouté au catalogue, qui n’est pas celui de la Redoute, une descente durant quelques heures dans les abysses océaniques, de quoi vous changer d’une plongée avec un tuba dans la mare aux canards. Et de ressentir une violente montée d’adrénaline. On a choisi pour cela un engin, mi-sous-marin, mi-bathyscaphe, non homologué, sur lequel certains spécialistes avaient signalé de possibles dysfonctionnements. Son nom : le Titan, comme Titanic, avec ic en moins.

Foin de tout cela, hardi petit, cinq aventuriers intrépides, ou inconscients, ont décidé de braver les périls et de rejouer Vingt mille lieues sous les mers, sauf que n’est pas Jules Vernes qui veut. Résultat, une implosion de l’engin s’est produite entre mille et quatre mille mètres de profondeur et nos cinq individus ont vu leurs corps éparpillés sur des centaines de mètres. Ils ont rejoint ceux de l’épave du Titanic, qu’ils étaient censés aller admirer moyennant 250 000 euros, le prix du billet. Un peu plus cher donc qu’une place dans un cinéma de quartier pour se faire peur avec Les dents de la mer.

Leurs cadavres s’ajoutent désormais aux centaines d’autres, parmi les 1500 passagers qui étaient à bord du navire qui a sombré le 14 avril 1912 dans l’Atlantique par 41° 46’ 00’’ nord et 50° 14’ 00’ ouest. Le Titanic avait vu son étrave d’acier déchirée comme une vulgaire feuille de papier à cigarette par un iceberg. De profundis !

Pour tenter de sauver les milliardaires du Titan on a déployé un luxe inouï de moyens et d’hommes et passé le fond de l’océan à la loupe. Si on avait pu, on l’aurait même passé au peigne fin. En pure perte.

Pendant ce temps, en Méditerranée, plusieurs centaines d’émigrés syriens et égyptiens ont péri noyé dans le naufrage de leur barcasse sur lesquels ils étaient près de huit cents entassés par des passeurs libyens appartenant à des réseaux mafieux.  Il n’y a eu que 184 rescapés. Amen !

Les secours déployés pour leur venir en aide ? Quelques vedettes de garde-côtes grecs en maraude dans le secteur, autant dire inexistants !

Moralité de l’histoire, si tant est que la morale existe dans ce genre d’histoire, que vous soyez riches ou pauvres, quand c’est l’heure, c’est l’heure, il faut y aller ! C’est la seule justice dans ce bas monde car la mort ne fait pas la distinction entre les classes sociales.