Le Sénégal est un pays où je me suis rendu plusieurs fois sans cependant apprécier les plages de Saly car ce n’était pas pour y passer des vacances.
La première fois c’était dans le cadre d’une opération humanitaire, en convoyant depuis la France des dizaines de milliers de préservatifs, afin de lutter contre le SIDA qui sévissait en Afrique, préservatifs que nous avons distribué avec l’ONG « Enda tiers-monde » dans des dispensaires et lycées du pays. Je suis très fier d’avoir accompli cette action en espérant qu’elle aura contribué à «préserver » des vies de ce fléau.
Deux ans plus tôt, j’avais réalisé le même type d’opération, mais au Tchad cette fois, en apportant, grâce à l’armée de l’air française, pompes à eau, fournitures scolaires et équipements médicaux.
Ces deux aventures restent gravées dans ma mémoire à tout jamais car je n’ai jamais eu, de toute ma vie, le sentiment d’avoir été aussi utile.
Ces actions, ainsi que mes nombreux reportages en Somalie, au Cameroun, en Côte-d’Ivoire, au Mali, en Afrique du Sud, etc. ont fait de moi un amoureux de l’Afrique où je compte de nombreux amis. La plupart d’entre eux m’ont d’ailleurs surnommé « l’africain blanc ».
Au Sénégal, j’y suis allé aussi à plusieurs reprises avec mon ami Ibrahima Thiam, président du mouvement politique « Un Autre Avenir », conseiller spécial de l’ancien Premier ministre Abdoul MBay, notamment pour y dédicacer nos ouvrages de géopolitique, « Le monde vu .. » ainsi que mon dernier roman « Amadou, l’enfant soldat du Sahel ». J’ai appris au cours de toutes ces années à connaître ce beau pays et aimer ses habitants chaleureux.
Ce qui se passe aujourd’hui me choque et m’attriste d’autant plus. Voici un pays qui, depuis son indépendance, en 1960, a été un phare de la démocratie sur le continent, une balise républicaine en Afrique de l’Ouest où ces dernières années ont fleuri les putschs militaires (Mali, Niger, Burkina Faso, etc.), un modèle en matière de paix pour ses voisins, où les militaires sont restés cantonnés dans leurs casernes et qui a eu la chance de compter des chefs d’Etat remarquables et exemplaires, tels Léopold Sedar Senghor ou Abdou Diouf.
Et voilà que tout ce bel édifice menace de s’écrouler. Déjà qu’il se lézarde, en raison de l’attitude de son actuel président, Macky Sall, qui à la veille de la fin de son mandat (avril) fracture la société sénégalaise et la communauté politique comme personne ne l’a fait avant lui.
En décidant contre toute attente le report des élections présidentielles, prévues le 25 février prochain, à la fin de l’année, il vient de réaliser un coup d’Etat institutionnel et rejoint la galerie des potentats africains de triste mémoire.
Après un septennat et un quinquennat, il aurait pu sortir par le haut, et avoir sa place dans les manuels d’histoire sénégalais, il va quitter le pouvoir par la petite porte de la honte et de l’infamie. Par son acte de putschiste contre la constitution il a entaché de façon indélébile ses douze années passées à la tête de l’Etat.
Et les sénégalais sont à plaindre car ils ignorent de quoi sera fait demain, quelle aventure les attend.
Fort heureusement, le pays de la Teranga ne manque pas d’hommes politiques de grande valeur et intègres pour le remettre sur les rails de la démocratie et de la liberté, a l’heure où les chantres de l’autocratie n’ont jamais été aussi nombreux sur le continent