Marseille : Un chauffeur de taxi est assassiné par un gamin de quatorze ans, rémunéré cinquante mille euros, dans le cadre du narcotrafic, on se croirait avec les sicarios, ces tueurs à gage mexicains ! Cavaillon dans le Vaucluse : Incendie d’un commissariat et de plusieurs voitures de police en représailles à des opérations « place nette » ! Grenoble : En centre ville, un fourgon blindé de transport de fonds est attaqué à la kalachnikov dans les rues du centre ville, en plein milieu de journée ! Martinique : nuits d’émeutes et emploi d’armes à feu en signe de révolte contre l’augmentation des prix et la vie chère ! Ici et là, des collèges et des lycées sont visés par des tirs de fusée et de mortiers, au risque d’être incendiés et de faire des victimes, etc. etc. La France vit à l’heure des règlements de compte sanglants , de la violence criminelle, voire de la guerre urbaine, et les colonnes des faits divers dans les journaux s’allongent quotidiennement de façon alarmante. La pègre tient aujourd’hui le haut du pavé, impose sa loi, des villes entières, pas seulement des cités ou des quartiers, ne vivent plus aujourd’hui dans un Etat de droit, mais sous la loi de la jungle, et les forces de sécurité, sensées nous protéger, désertent le terrain et sont contraintes de se réfugier dans des commissariats devenus autant de Forts Alamo, eux-mêmes pris pour cibles par la racaille des banlieues. On dégaine dans nos rues comme aux meilleurs jours du Far West. Il est loin le temps des sauvageons décrit par Jean-Pierre Chevènement, aujourd’hui c’est celui des barbares. Et on ose parler de « sentiment » d’insécurité ? De qui se moque-t-on ?
Et quelle est l’origine de tous nos malheurs ? La drogue, un trafic extrêmement juteux ! On estime aujourd’hui à environ 4 milliards le chiffre d’affaires annuel réalisé par les narcotrafiquants en France en 2024, cannabis, cocaïne, ecstasy, etc. et plus probablement 6 milliards, c’est aussi plus de 140 tonnes de stupéfiants saisis par les douanes françaises l’an dernier. Certains points de deal (3 000 en France) dans les quartiers nord de Marseille ou d’Avignon peuvent rapporter jusqu’à 40, 50 mille euros quotidiennement, une rentabilité que leur envierait nombre de fonds de commerce de l’Hexagone C’est d’ailleurs si vrai que ces points de deal, une entrée d’immeuble, une cage d’escalier avec un canapé en extérieur pour les guetteurs, se négocient à des prix bien plus élevés qu’un bar tabac, une boulangerie, ou un café PMU et que leur rentabilité est telle que les acheteurs paient en cash sans avoir besoin d’un prêt bancaire. La banque, c’est eux ! Seule recommandation, avoir un 9mm ou un 11,43 dans la ceinture au moment de la transaction car les contestations ou litiges ne sont pas portés devant les tribunaux, ou alors devant le juge « du milieu ». Autre avantage, les cadavres ne font pas appel du jugement et la sentence est appliquée immédiatement car si Robert Badinter a aboli la peine de mort en 1981 les gangs liés au trafic de drogue l’ont rétablie depuis longtemps !
Mais se pose-t-on la question de savoir pourquoi ce marché est aussi florissant ? Alors que le marché des cigarettes est en baisse, en raison de l’augmentation du prix du paquet et des taxes, les drogues ne se sont jamais aussi bien vendues que maintenant. Sait-on que le marché du cannabis en France, avec 5 millions de consommateurs, sur 22 millions dans l’UE, est le plus important d’Europe ?Viennent ensuite la cocaïne et les drogues de synthèse. Autrement dit, si on se basait sur le principe du « pas de receleur, pas de voleur » poursuivre et condamner des consommateurs serait le meilleur moyen de tarir la source du narcotrafic. Aujourd’hui on estime que près de 15% des adultes de 18 à 64 ans ont consommé au moins une fois une drogue illicite. Qu’attend-t-on pour le faire ? Est-ce, que parce que socialement les sniffeurs appartiennent moins à la catégorie « employés-ouvriers » que celle des cadres, journalistes, acteurs, chanteurs, artistes du show-biz, et autres politiciens ? Allez, une petite ligne pour la route ! Sait-on aussi que 250 000 personnes vivent de ce trafic juteux dans notre pays, quant tant d’autres meurent d’une overdose ?
On sait moins en revanche que l’année dernière on a enregistré plus de 315 homicides liés au trafic de drogue, un bond de 60% par rapport à l’année précédente. Les trafiquants, telle une pieuvre, n’étendent pas seulement leurs tentacules dans les grandes villes, Paris, Saint-Denis, Marseille, Lyon, Toulouse, etc. mais aussi dans les villes moyennes, comme Compiègne avec un taux record de consommation, ou Millau dans l’Aveyron, classée en 5ème position, jusqu’aux plus petites zones rurales, au point de constituer un véritable fléau dans notre société. Et on ne va pas se rassurer en disant que dans notre pays la plus grosse addiction revient encore et toujours à l’alcool.
Lutter contre les réseaux de drogue relève d’une question de santé publique et de sécurité publique, c’est aussi afficher une volonté de lutter contre le blanchiment de l’argent sale des maffias et des bandes criminelles, qui, avec la prostitution, la traite des êtres vivants (réseaux de passeurs de migrants) et le trafic d’armes, contribuent largement au financement du terrorisme. Ce n’est pas anodin, c’est pourquoi la lutte contre le narcotrafic devrait être aujourd’hui une grande cause nationale en France, en plus de celle des handicapés, en créant pour commencer un service d’investigation et de répression, analogue à l’agence fédérale américaine, la DEA (Drug Enforcement Administration).
Agissons avant que la gangrène n’ait rongé la société française jusqu’à l’os, ne voyez-vous pas déjà ces vols circulaires de vautours, attirés par l’odeur du cadavre en voie de décomposition ?
Jean-Yves Duval, journaliste écrivain.