En cette deuxième quinzaine de janvier deux faits marquants dominent l’actualité internationale du moment. Le premier est la trêve signée entre le gouvernement israélien et le Hamas, avec en corollaire le retour de 33 otages juifs, dont plusieurs Franco israéliens, en échange de 737 palestiniens, dont une multitude d’assassins du pogrom d’octobre 2023, détenus dans les geôles de l’Etat Hébreu, après quinze mois de guerre dans la bande de Gaza et des dizaines de milliers de morts. Plus tard il faudra panser les plaies et reconstruire un pays dévasté, où ne subsiste qu’un champ de ruines. En attendant ce moment, réjouissons nous de la libération des otages emprisonnés à Gaza, qui ont vécu l’enfer de la détention dans des tunnels durant près d’un an et demi, et le retour chez elle de la population gazaouie qui a vécu durant le même temps sous les bombardements, deux peuples martyrisés dont la réconciliation est désormais mission impossible.

Le deuxième événement est bien sûr le retour, ce lundi 20 janvier, à la Maison Blanche de Donald Trump, ressuscité des morts, le come back victorieux de celui que ses détracteurs politiques voient comme un looser alors que ses partisans le présentent comme un winner. « Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà » nous rappelle Pascal.

Au demeurant, les deux événements sont étrangement liés.

En effet, si un cessez-le-feu a pu être signé entre les belligérants au Proche-Orient c’est bien parce qu’après tous les atermoiements de l’administration Biden ces derniers mois Trump « la menace » s’est invité dans la danse au cours des semaines passées en poussant un coup de gueule comme il en a l’habitude, aussi bien auprès de Benyamin Netanyahou, l’allié des Etats-Unis, qu’envers les dirigeants du mouvement terroriste, déjà largement affaibli depuis le 7 octobre 2023.

A ce sujet, une image en dit plus qu’un long discours, il s’agit de la photo officielle du nouveau commandant en chef américain, dont la stratégie est d’attaquer et de mentir, où on le voit le regard dur, la mâchoire serrée avec un éclairage en contre plongée qui n’est pas sans rappeler l’affiche d’un film d’horreur.  Il indique clairement au monde entier et à ses compatriotes que « fini de rire », le boss est revenu et entend bien remettre de l’ordre dans la politique intérieure des Etats-Unis ainsi que dans les dossiers internationaux de la première puissance mondiale.  Chacun n’a qu’à bien se tenir, russes, européens, chinois compris, l’avertissement est clair !

Et déjà, aux States, certains se frottent les mains, en l’occurrence les émeutiers, y compris le célèbre chamane avec ses cornes de bison,  qui ont pris d’assaut le Capitole, ce temple de la démocratie américaine, dès l’annonce de sa défaite voici quatre ans. Le bel encouragement à l’insurrection que voilà ! Pour le reste, le clivage n’a jamais été aussi grand entre démocrates et républicains et les mois qui vont venir vont illustrer le fossé béant qui existe aujourd’hui entre ces deux camps au sein d’une Amérique, qui n’a jamais été aussi divisée et proche de la guerre civile. Le phare de la démocratie ne brille plus outre-Atlantique et la statue de la Liberté (offerte par la France pour le centenaire de l’indépendance des Etats-Unis et inaugurée en 1886), à l’entrée du port de New York, vacille sur son socle.

Le retour au bureau ovale du géant transgressif, à la mèche  blonde et la cravate rouge, personnage iconique qu’on dirait tout droit sorti des super-héros de comics,  permettra-t-il l’arrêt des combats en Ukraine et la signature d’un traité de paix avec la Russie ? Rien n’est moins sûr, il est trop tôt pour le dire, mais nul doute que les lignes vont bouger dans cette région du monde, avant qu’un éventuel nouveau conflit n’éclate, cette fois dans le Pacifique, tant il est vrai que la Terre est devenue une poudrière, climatique et conflictuelle.

Le retour de Trump, ce self-made-man à la virilité triomphante, confirme la montée en puissance de toutes les formes de radicalismes dans un monde qui n’a jamais été aussi dangereux. A l’extrémisme islamiste conquérant et l’appétit de pouvoir insatiable d’oligarques puissants, impérialistes en Chine, en Russie, en Iran, et en Turquie s’opposent désormais des dirigeants populistes en Italie, en Argentine, en Hongrie, en Autriche, en Amérique et demain peut-être en Allemagne, et qui sait en France.

Le monde n’a jamais dansé aussi dangereusement sur un volcan alors que dans l’Hexagone, à l’heure d’une dette abyssale, on attend toujours de voter un budget indispensable au bon fonctionnement du pays, après trois semaines de vacances des députés lors de la trêve des confiseurs, (est-ce la meilleure manière de servir la nation en période de turbulences ?) tandis que  les motions de censure s’enchaînent, les gouvernements se succèdent et que les élus politiques de tout poil  s’écharpent et vocifèrent dans l’hémicycle de l’Assemblée  nationale, étrangement sourds et aveugles aux convulsions d’un pays au bord du gouffre, de plus en plus instable (et d’une éventuelle résurgence d’un mouvement style « gilets jaunes »)  et d’un monde explosif. Situation surréaliste, et spectacle désolant que  nous offrons à nos alliés, nos partenaires et aux amis d’un pays qui, faut-il le rappeler, fut un modèle envié par tous. C’était, il est vrai, au siècle des Lumières, avant qu’il ne plonge dans les ténèbres.

Ainsi, face à la force, aux roulements de biceps  de certains dirigeants de la planète, la France affiche, comme jamais dans son histoire récente, une coupable et dangereuse faiblesse. Le bateau tricolore est balloté de toute part sur une mère démontée avec cette question obsédante et inquiétante : A quand un équipage à bord ? A quand Astérix et sa potion magique pour venir au secours du navire amiral de la flotte ? Au secours Vercingétorix, Jeanne d’Arc, Napoléon, Clémenceau et Charles de Gaulle, vous ne serez pas de trop pour nous sortir du bourbier dans lequel nous sommes englués.

Près d’un mois après la cérémonie traditionnelle des souhaits de bonne année il se confirme que présenter ses vœux est une formalité inutile tant ils ne conjurent en rien les catastrophes nationales et mondiales, pas plus qu’ils nous prémunissent des malheurs familiaux et personnels. Cet exorcisme a, une nouvelle fois, montré ses limites en ce début 2025, comme lors des années qui ont précédé. Mieux vaudrait se souhaiter « Bonne chance »

On a voulu y croire pourtant, naïfs que nous sommes, prêts à nous raccrocher à la première bouée de sauvetage venue, alors que contrairement au naufrage du Titanic un orchestre ne va pas accompagner le déclin, de notre pays, à moins d’un requiem de Mozart ou de Beethoven.

Comme pour les hôpitaux il est urgent de déclencher un « Plan Blanc » national car la France ne pourra pas éternellement vivre sous perfusion des fonds de pensions étrangers et des banquiers internationaux, tout passe, tout lasse, renonçant du même coup à notre souveraineté financière et abandonnant une parcelle de notre indépendance nationale,  alors que notre endettement est criard et que les taux d’intérêts n’ont jamais été aussi élevés du fait de notre incapacité récurrente à régler nos problèmes économiques et sociaux quotidiens. L’incurie de nos dirigeants successifs, depuis des décennies, trouve aujourd’hui son épilogue et ceux qui ont voulu voir en Emmanuel Macron un nouveau roi Midas qui transforme en or tout ce qu’il touche, en sont pour leurs frais. Ces mêmes français ont oublié que, selon la mythologie grecque, même la nourriture se transformait alors en or et que la population ne pouvait plus s’alimenter.

On devrait se souvenir parfois des Evangiles qui nous enseignent que l’Humanité n’a rien à gagner à idolâtrer le Veau d’or.

C’est triste et pathétique de voir une nation qui se meurt lorsque cette nation s’appelle la France au passé séculaire. Celle-ci n’est déjà plus que l’ombre d’elle même, alors qu’elle a rayonné sur le monde durant des siècles et fait l’admiration de nombreuses populations sur le globe. La leçon à retenir, telle la morale de la  fable, est qu’il en va pour les pays comme pour les individus : Quand une lignée, jusque-là noble, devient abâtardie et décadente elle se transforme en queue de race, nous en sommes là !

Jean-Yves Duval,  journaliste écrivain