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Cécité et surdité, ces deux maux français inguérissables !

En voyant la lenteur d’escargot avec laquelle Emmanuel Macron nomme ses Premiers ministres successifs, je me suis fait la réflexion que s’il était une femme il ne risquerait pas d’accoucher d’un prématuré.

Je me suis dit aussi, qu’avec lui au Vatican, on attendrait longtemps avant d’apercevoir la fumée blanche s’élever au-dessus de la basilique Saint-Pierre, qui symbolise l’élection d’un nouveau pape. A croire que le conclave est devenu un rituel républicain à chaque changement de gouvernement.  Patience et longueur de temps font plus force ni que rage, ce proverbe que l’on doit à Jean de la Fontaine semble être la devise du locataire de l’Elysée au prétexte qu’il serait le maître des horloges, même si pour cela il doit mettre  les nerfs des français à rude épreuve, et abuser de leur patience. Le monarque républicain est d’ailleurs connu pour être continuellement en retard, ce qui témoigne d’un souverain mépris à l’égard de ses semblables.  A l’évidence, il a oublié ce que disait Louis XVIII :  » La ponctualité s’impose à tous, même aux rois ». Snober les français est une chose, snober la France en est une autre, car pendant tout ce temps le pays n’est pas gouverné, que le vote du budget est indispensable et urgent  et que les paysans attendent désespérément qu’on veuille bien se préoccuper de leurs difficultés, mais aussi que notre dette abyssale continue d’exploser, l’insécurité de croître et d’embellir dans nos villes, le narco-trafic de se développer dans nos quartiers à vitesse grand V, tandis que la crise migratoire attend toujours le début du commencement d’un règlement.

Tel est le bon vouloir du prince qui nous gouverne, qui n’en fait qu’à sa tête et selon ses caprices, « quoi qu’il en coûte » à la France et aux français. C’est au point qu' »En Marche » devrait être rebaptisé « Voie sans issue », avant qu’un jour prochain la station s’appelle « Terminus ». Quant au fameux slogan « En même temps », qui devait révolutionner le monde, il est tout juste bon à remiser au magasin des accessoires, rayon des espoirs perdus et des ambitions anéanties.  Le temps, 7 ans,  a eu raison de ce mantra. Il est tellement rouillé qu’on ne voit pas comment il pourrait tenir encore trois ans.

Et pendant ce temps, le canon tonne aux frontières de l’Europe, les économies de nos voisins tournent à plein régime alors que la France est désormais le plus grand pays désindustrialisé d’Europe : seuls Malte et Chypre font pire que nous et qu’on se pose sérieusement la question : La France est-elle devenue un pays en voie de développement ? Sans compter que, selon l’INSEE, le taux de croissance du quatrième trimestre 2024  sera de +0,0%  et que la prévision pour l’année s’établira seulement à 1,1%.

Depuis la dissolution calamiteuse de l’Assemblée nationale décidée par E. Macron le 9 juin dernier, que de mois perdus ! Et que dire des conséquences catastrophiques de la motion de censure votée au motif d’intérêts partisans et et au détriment de l’intérêt général du pays ? Les mauvaises décisions s’enchaînent telles un mauvais génie. Le nombre des faillites d’entreprises (66 000)  va atteindre un niveau record tandis que les files de chômeurs ( 300 ooo) vont s’allonger devant Pôle emploi, le niveau de vie de nos compatriotes diminue drastiquement et le nombre des ménages en situation de précarité augmente sans cesse. Mais rassurez-vous braves gens, tout va très bien madame la marquise. Il y a seulement le feu aux écuries !

Un beau matin, peut-être, entendant les rumeurs monter du Faubourg Saint-Honoré, l’occupant du « château » demandera au majordome qui lui apporte des croissants chauds : « Est-ce une révolte, Firmin ? », ce à quoi l’homme en livrée noire et au gilet rayé lui répondra : « Non, sire, c’est une révolution ! ».

L’histoire a ainsi régulièrement des bégaiements, des convulsions sporadiques qui correspondent à une fin de règne par suite de la cécité de ses dirigeants. Alors que dire, si, en plus, ils sont atteints de surdité ?

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

4 décembre 2024, la journée des dupes !

1962 – 2024, soixante deux ans séparent ces deux dates qui ont pour point commun le dépôt d’une motion de censure, l’une contre le gouvernement de Georges Pompidou et l’autre celui de Michel Barnier, par ailleurs grand admirateur du Premier ministre du général de Gaulle, celui-là même qui aimait à dire « Il faut arrêter d’emmerder les français« , une phrase toujours d’actualité.  Deux motions de censure au cours d’une République née en 1958 avec le retour de Charles de Gaulle à l’Elysée, c’est dire leur caractère exceptionnel et la gravité du moment.

Cette journée du mercredi 4 décembre restera dans la mémoire collective comme une journée des dupes et n’est pas sans rappeler celle du 11 novembre 1630 (dont elle tire son nom) lorsque Louis XIII, contre toute attente, réitéra sa confiance à son ministre Richelieu, éliminant ainsi ses adversaires politiques et contraignant la reine-mère Marie de Médicis à l’exil. Certes la France ne vit plus sous la menace d’une guerre de trente ans, mais les inquiétudes sont bien là, présentes à nos portes, des risques de guerre européenne à une crise financière, en passant par les faillites d’entreprises et les mouvements sociaux.

Journée des dupes car pour être votée la motion de censure devait recueillir les voix de LFI et du Rassemblement national, une alliance qualifiée à juste titre par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau de « mariage de la carpe et du lapin ». Comment les électeurs, non pas les députés et les cadres du RN, jugeront-ils demain cette accointance contre nature, cette union illégitime, entre les défenseur de l’ordre et de la sécurité avec des députés qui refusent de reconnaître le pogrom et les tueries du 7 octobre 2023 en Israël commis par des barbares islamistes, qui refusent également de qualifier ceux-ci de « terroristes » leur préférant le terme de « résistants », ce qui est une ignominie, ou qui ont voulu abolir la loi condamnant l’apologie du terrorisme, j’en passe et des meilleurs.

Quant aux insoumis, comment ont-ils pu accepter que les députés de Marine Le Pen mêlent leurs voix aux leurs pour obtenir la majorité nécessaire à l’adoption d’une motion de censure, alors que voici quelques mois ils ont appelé à faire un « barrage républicain » contre ces mêmes députés ? Il y a là une forme de duplicité, un marché de dupes qui atteint des hauteurs himalayennes, les uns et les autres ayant vendu leur âme au diable et ont partagé le repas avec lui sans même prendre la précaution de se munir d’une longue cuillère.

Par ailleurs comment ne pas s’arrêter un instant sur les arrière-pensées de l’extrême droite savourant là sa vengeance au lendemain des réquisitoires extrêmement graves portés par la justice à l’encontre de leur leader empêtrée dans des histoires de financements d’assistants parlementaires ? Et de l’extrême-gauche, qui dans sa démarche révolutionnaire, et après avoir « bordélisé » le Parlement, entend aujourd’hui installer le chaos dans le pays, et pour commencer en exigeant la destitution du président de la République, au risque de provoquer un coup d’Etat institutionnel ?

Que dire enfin des socialistes, dont le premier d’entre eux, Olivier Faure, est totalement vassalisé, soumis aux insoumis ? Lui et son état-major me font penser aux bourgeois de Calais qui, la corde autour du cou, ont fait acte d’allégeance au roi d’Angleterre Edouard III en 1347, le monarque étant ici Jean-Luc Mélenchon. Où est passé le grand parti de gouvernement qui a donné deux présidents de la République à la France ?  Parlons justement de l’un d’entre eux, François Hollande, dont on aurait pu attendre un peu plus de lucidité, d’honnêteté et surtout de responsabilité après avoir exercé les plus hautes fonctions dans notre pays. Comment imaginer qu’il ait pu s’acoquiner avec un ancien Trotskyste sauf à reconnaître qu’il doit son élection, à Tulle, aux voix mélenchonistes à l’image de nombreux rescapés socialistes de la dernière élection législative. Les socialistes, au cours de l’histoire, ont toujours eu l’art de tisser le nœud coulant qui allait les étrangler, Lénine ne disait pas autre chose : « Nous soutiendrons les socialistes, comme la corde soutient le pendu », quand d’autres préféraient la formule plus fleurie de « plumer la volaille socialiste ».

Pour autant on s’interrogera longtemps sur les raisons qui ont empêché le Premier ministre (démissionnaire) Michel Barrnier d’accepter la condition qu’exigeait Marine Le Pen concernant l’indexation des retraites, qui lui aurait permis de sauver sa tête et à cette dernière de sortir par le haut de sa partie de bras de fer avec Matignon. A-t-il cédé aux injonctions d’un certain Gabriel Attal pour qui seul importe la prochaine présidentielle de 2027, ou aux instructions d’un Emmanuel Macron qui porte la responsabilité de ce qui se passe aujourd’hui après sa dissolution rocambolesque de l’Assemblée Nationale, et qui tel Néron assiste, impuissant, à l’incendie de Rome. Quant à la seconde était-elle allée trop loin pour envisager de reculer ? A moins que dans les deux cas, l’Ego ne l’ait emporté sur la raison.

Et dans tout cela, me direz-vous, que fait-on de la France, car en vérité c’est la seule question qui vaille.  Bien peu de cas, je le crains, tant les ambitions personnelles d’un Vauquiez, d’un Philippe, d’un Attal, ou d’un Darmanin  sont dévorantes et tellement leur appétit du pouvoir est grand. En portant la constitution de la Vème République sur les fonts baptismaux le général de Gaulle avait voulu mettre fin à l’impuissance du régime parlementaire incapable de gérer le problème de la décolonisation. Malheureusement on assiste actuellement à la résurgence de ces mêmes partis politiques, dont les dirigeants, qui sont les frères jumeaux de ceux de la IVème République, sont beaucoup plus soucieux de leur propre avenir que celui du pays.

Voilà pourquoi la journée du 4 décembre 2024, restera dans l’histoire comme une journée des dupes.

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

Un écrivain enterre un mot chaque jour.

A l’heure où je m’apprête à publier à la mi-décembre 2024, mon dix-septième ouvrage « Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », je mesure davantage le chemin parcouru depuis vingt-quatre ans, date de sortie de mon premier livre « Le Prix du sang bleu ». Après douze romans, deux biographies historiques, et trois ouvrages de géopolitique,  auxquels il faut ajouter sept ou huit autres livres comme auteur « fantôme »,  j’ai réalisé mon rêve d’enfant, devenir écrivain. Et comme disait un certain Roger Couderc, commentant la victoire de l’équipe de France de rugby lors d’un match du tournoi des cinq nations « après cela, on peut mourir ».

Tant il est vrai, qu’arrivés à un certain âge nous sommes tous en sursis, confirmant que la vieillesse est un privilège qui n’est pas accordé à tout le monde, avant, comme le disait le général, d’être un naufrage. Au demeurant, depuis quelques temps déjà, lorsque je commence l’écriture d’un nouveau roman je ne suis jamais sûr de le terminer, et un jour viendra, nécessairement, où l’ouvrage restera sur le métier, inachevé. Tel est notre sort commun. Etrangement, au moment où mon manuscrit « Claude Hervé et le MSB » est sur le point d’être mis en rayons dans  les librairies, un souvenir m’est revenu en mémoire, et un sentiment de tristesse m’a envahi.

Le souvenir se rapporte à un moment de mon service militaire alors que j’avais été admis à l’hôpital militaire « Percy » à Clamart, en région parisienne. Le jeune gaulliste que j’étais connaissait de nom cette localité car quelques années plus tôt, le général de Gaulle y avait été victime d’un attentat de la part d’anciens officiers de l’OAS. Il n’avait dû qu’à sa baraka légendaire d’avoir la vie sauve. Durant trois mois, j’allais subir là une batterie d’examens relatifs à une bronchite chronique que je traîne comme un boulet depuis mon enfance. Au même moment, dans une aile différente de cet établissement de santé prestigieux des armées, des chirurgiens s’efforçaient de réaliser des greffes de la peau et de sauver la vie de plusieurs ingénieurs de chez Kodak, très grièvement brûlés. Trois mois, c’est long, mais ils passèrent à la vitesse de l’éclair car j’avais été affecté, comme patient, à la bibliothèque de l’hôpital et chaque jour avec un petit charriot je faisais le tour des différents services pour offrir des livre aux malades qui le souhaitaient. Il y a pire comme corvée ! Après la bibliothèque de l’université, celle de Percy fut mon deuxième paradis sur Terre. Gaston Bachelard n’a-t-il pas écrit : « Le paradis, à n’en pas douter, n’est qu’une immense bibliothèque ».  Les rumeurs circulant vite dans un lieu aussi confiné on avait aussi appris qu’avant d’endosser l’uniforme kaki, j’avais entamé une carrière de journaliste et que je devais être affecté au SIRPA (le service d’information et des relations publiques de l’armée). Sauf que par suite d’une infection, peu après mon incorporation, j’avais échoué à Percy. Du coup, plusieurs de mes voisins de chambrée, qui maîtrisaient à peine la langue de Molière, me demandèrent d’écrire des lettres d’amour à leur dulcinée, ce que j’acceptai après un temps d’hésitation, en échange de paquets de cigarettes (alors que je ne fumais pas). Je mis tout mon cœur à l’ouvrage, au point que les destinataires étaient toutes énamourées en lisant les missives en question et que leurs réponses emplissaient de joie mes camarades conscrits qui s’expliquaient mal cette inflation de tendresse à leur égard.  Il faut dire que je n’écrivais pas sous leur dictée mais que je rédigeais chacune d’elle comme si je m’adressais à ma propre petite amie. Je compris au bout d’un moment qu’il fallait que la plaisanterie s’arrête car en lisant à travers les lignes je devinai qu’elles étaient sur le point de réaliser un transfert affectif sur ma personne. Heureusement, la décision des autorités militaires de me réformer, mit un terme à ces échanges épistolaires singuliers. Je réalise aujourd’hui seulement que mon plaisir d’écrire et mon imagination fertile sont sans doute nés là, à l’hôpital Percy, non pas au service « maternité », mais « pneumologie ».

Quant au sentiment de tristesse, il tient tout simplement au fait que mon père est trop tôt disparu pour avoir lu le premier livre que j’ai écrit, et qu’il serait sans doute fier de moi en voyant le chemin parcouru. La maladie l’a privé de cette joie et moi d’un sentiment de reconnaissance envers lui. Il n’aura jamais su, non plus, les nombreux reportages que j’ai effectués à travers le monde et pourtant je suis sûr qu’il aurait envié cette vie aventureuse, sur les théâtres d’opérations militaires comme dans les salons d’ambassade, au Vietnam comme à Cuba, au Liban comme au Kosovo,  en Somalie comme au Cambodge, au Tchad comme en Bosnie ou en Albanie, mais aussi lors de la première guerre du Golfe en Arabie Saoudite ou encore en Russie, au Mali, en Côte d’Ivoire et en Afrique du Sud. J’étais  un reporter aux semelles de vent qui vivait une existence digne des bandes dessinées et il a tout ignoré de ma part d’ombre et de lumière. Nous avions l’Histoire en commun, mais notre histoire commune fut trop courte. Finalement, nous sommes restés des étrangers l’un pour l’autre, alors que j’aurais tant aimé que nous soyons complices. Quant à ma mère, je n’ai d’elle aucune odeur de peau, aucun souvenir d’allaitement maternel, aucune trace de lèvres sur le front de l’enfant qui s’endort, aucune caresse pour le bercer, aucun regard. Et pour cause, je ne l’ai pas connue, si l’on excepte une rencontre post-mortem, dans un petit cimetière, des décennies plus tard. Qu’aurait-elle pensé d’avoir un « fils écrivain », alors qu’elle ne m’avait pas élevé comme un simple fils ? J’étais venu au monde parce qu’une femme avait aimé un homme, avant qu’elle ne reparte sans avoir eu le temps de m’aimer moi, pour elle j’étais un cœur de trop. Je leur dédie ce livre, petites étoiles perdues dans l’immensité de l’univers.

Certains prétendent que l’écriture est l’expression d’un manque, la traduction d’une fêlure, auquel cas ce n’est pas d’une bronchite chronique dont je devrais souffrir, mais plutôt de ces fractures à l’âme, autrement plus douloureuses et cruelles. Léon-Paul Fargue écrivait « qu’un bon écrivain est celui qui enterre un mot chaque jour« .  Si j’en parle aujourd’hui c’est parce que ma cuirasse est faite d’un métal éprouvé par ses fragilités, et que ces blessures n’ont pas cicatrisé, et ne cicatriseront jamais.

Avec l’écriture de ce livre de 290 pages : « Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », j’ai décidé de mettre le doigt sur « pause » dans l’imaginaire des romans, thrillers, et autres uchronies qui constituent mon quotidien et j’ai repris mon bâton, non de pèlerin, mais de journaliste, afin de recueillir de nombreux témoignages des principaux dirigeants des collectivités locales, d’élus, de hauts fonctionnaires, de responsables sportifs du MSB, etc. afin de découvrir la personnalité méconnue de celui qui, durant seize ans, a présidé aux destinées d’un des plus grands clubs de basket français. Je l’ai fait, dix-huit ans après avoir écrit une biographie : « Claude Hervé, le roman d’une vie », c’est donc un nouveau livre-document, un livre-enquête sur une personnalité fascinante que je connais depuis les années 1990, que je livre aujourd’hui aux lecteurs. Puissent-ils y trouver le même plaisir à le lire, que j’en ai eu à l’écrire.

A la veille des fêtes de fin d’année, j’ai une recommandation à vous faire : « Offrez des livres ! Ils s’ouvrent comme des boîtes de chocolat et se referment comme des coffrets à bijoux ».  (Bernard Pivot)

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

 

NB : 1) L’ouvrage « Claude Hervé, le roman d’une vie » est toujours disponible à la Maison de la presse de la galerie marchande du magasin Leclerc « Les Maillets Fontenelles » route de Bonnétable au Mans.

2) Je dédicacerai, avec Claude Hervé, mon dernier ouvrage  » Claude Hervé et le MSB, 16 ans de bonheur », samedi matin 14 décembre 2024, de 10 heures à 12 heures, au Centre Leclerc des Maillets Fontenelles. Je serai heureux de vous accueillir.

Menaces existentielles : l’optimisme du cœur et le pessimisme de la raison

Jamais au cours de notre histoire les menaces existentielles qui planent au-dessus de nos têtes, telle une chappe de plomb, n’ont été aussi nombreuses et variées. Elles sont multiformes au point de mettre l’humanité et le globe terrestre en péril. Etat des lieux.

A commencer par celles qui concernent le réchauffement, où plutôt le dérèglement climatique, qui est source de catastrophes naturelles innombrables, des mégas incendies de Californie aux inondations espagnoles cataclysmiques, en passant par la montée alarmante du niveau des mers qui va impacter de nombreux littoraux sur tous les continents, les typhons et cyclones à répétition,  la fonte des glaciers et l’épuisement des ressources en eau naturelle, la pollution marine aux hydrocarbures et aux déchets plastiques qui déciment des colonies entières de mammifères marins et dépeuplent les bancs de poissons, la désertification des sols qui provoque la famine parmi de nombreuses populations et conduit des millions de personnes à laisser derrière elles leur habitation et leur  lopin de terre, et à prendre la route de l’exil pour un aller sans retour.

La Terre se meurt un peu plus, jour après jour, et personne ne semble entendre son cri d’agonie, elle meurt, non pas à « petit feu » mais à vitesse grand V. Elle n’a jamais été mise aussi en danger en si peu de temps, le 21ème siècle aura détruit ce que les vingt siècles précédents ont construit. Pas de quoi être fier ! Il y a lieu d’être inquiet pour les générations futures à qui on va laisser ce funeste héritage, mieux vaux pour elles de refuser la succession. La mondialisation à fait de la Chine une usine planétaire où chaque habitant du globe vient faire son marché, sans avoir à se déplacer de chez lui, grâce à la fée Amazon et aux millions de cargos containers qui sillonnent les mers ajoutant, comme si  c’était nécessaire, à l’empreinte carbone déjà lourde. L’empire du Milieu, qui a succédé à celui du petit livre rouge de Mao, à bousculé cul par dessus tête les productions industrielles nationales et locales et modifié en profondeur les échanges commerciaux. Les marxistes d’hier sont devenus les champions d’un libéralisme et d’un capitalisme sauvage et la route de la soie de Xi Jinping n’a plus rien à voir avec celle de Marco Polo.

Cette même mondialisation, autre menace existentielle majeure, qui par la diversité et la rapidité des moyens de transports d’un point du globe à un autre,  et en raison des milliards de voyageurs transportés en cabine et de tonnes de marchandises dans la soute des avions et les cales des bateaux, véhicule un nombre incalculable de virus et de microbes, souvent inconnus, à l’origine de pandémies mortelles, à l’image du Covid 19, venu, comme par hasard, de Chine. Cette même mondialisation encore, qui sera à l’origine, dans les mois et les années qui viennent, de la faillite et de la fermeture d’entreprises en très grand nombre, entraînant avec elles leur cohorte de nouveaux chômeurs. Sans oublier la disparition progressive, ici même en France, de nos exploitations agricoles au bord de la ruine (on estime leur nombre à 30 % d’ici à 2035) alors qu’actuellement, selon la MSA, un agriculteur se suicide chaque jour. Que deviendra notre société de consommation lorsqu’il n’y aura plus rien à consommer, nos élites internationales et nos technocrates de tout poil,  y ont-ils pensé ?

Menaces existentielles encore avec le retour, 80 ans après les premières explosions atomiques américaines sur le Japon, à Nagasaki et Hiroshima, de risques nucléaires pour cause de guerre aujourd’hui entre la Russie et l’Ukraine, et demain peut-être dans le Pacifique, entre la Chine, voire la Corée du nord et l’Amérique. Les arsenaux de l’Est et de l’Ouest sont tels qu’ils peuvent faire exploser plusieurs fois la planète.  Menaces existentielles toujours pour les abeilles menacées d’extinction par les pesticides, comme des milliers d’autres insectes et animaux en Europe, en Afrique et en Asie. Selon les scientifiques 1 million d’espèces animales seraient ainsi menacées au cours des prochaines décennies, provoquant une crise majeure de la biodiversité. Et que dire des pluies acides, liées à la pollution industrielle, à l’origine de la disparition de nombreux massifs forestiers. C’est tout notre écosystème qui est aujourd’hui en danger de mort.  Menaces existentielles, encore et toujours, sur les nombreuses variétés de poissons qui peuplent nos fonds marins à cause des pêches intensives (à l’exemple des thons et des baleines, dont le  Japon fait une consommation excessive) et l’existence de bateaux usines qui draguent tout sur leur passage, ne laissant derrière eux que des miettes pour les populations locales et mettant en danger la reproduction. Et je pourrais multiplier les exemples. Que de crimes contre l’environnement n’a-t-on pas commis au nom de l’industrialisation et de la mondialisation, de ce besoin de posséder toujours d’avantage et de paraître, plutôt que de satisfaire raisonnablement ses besoins et d’être !

Oui, les menaces existentielles, comme les températures ne sont pas qu’un ressenti, mais une réalité, sauf à vouloir se voiler la face ou faire l’autruche. Notre existence humaine, animale et végétale n’a jamais été aussi compromise qu’aujourd’hui du fait de la cupidité des hommes, ces plus grands prédateurs que la Terre a engendré. A côté d’eux, les loups et les requins blancs sont des agneaux. C’est au point que ce que les cinq premières extinctions de masses n’ont pas réussi à faire depuis près de 4 milliards d’années, la sixième pourrait être fatale pour l’humanité et c’est si vrai, qu’un homme, Elon Musk, le colistier de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine, l’homme le plus riche du monde et inventeur génial des voitures Tesla, du réseau satellitaire Starlink et des fusées Space X, se propose de coloniser la planète Mars, avec un premier vol en 2026, comme on a hier colonisé l’Algérie, l’Afrique de l’Ouest ou l’Indochine, fort du constat que les ressources naturelles sur Terre auront été épuisées par notre voracité et notre folie et que tout vie sera désormais impossible sur la planète.

Comment enfin, toujours au titre des menaces existentielles, ne pas se révolter contre le wokisme, sorti tout droit des universités américaines, qui a pour ambition de revisiter notre façon de penser, jugée archaïque, ainsi que la « cancel culture » également inspirée des États-Unis qui prône une culture de l’effacement et du reniement de tout ce qui constitue notre patrimoine intellectuel et fonde notre histoire. Un proverbe chinois ne dit-il pas que le poisson pourrit par la tête ? A ce compte-là, la France n’aura bientôt plus que des arrêtes !

Au terme de ce bref tour d’horizon des menaces existentielles auxquelles nous sommes contraints de nous accommoder, il me revient une question qu’on m’a souvent posée : « Par nature, êtes-vous plutôt optimiste ou pessimiste », à laquelle j’ai toujours répondu en citant le philosophe italien Gramsci : « Je suis optimiste de cœur et pessimiste de raison !« . Comment en effet ne pas être pessimiste en voyant l’évolution actuelle du monde, à moins d’être sourd et aveugle, quant à être optimiste, désolé, on n’a plus les moyens.

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

Paul d’Estournelles-de-Constant, ce sarthois Prix Nobel de la Paix (en 1909), afin que nul ne l’ignore.

L’automne est une saison traditionnellement marquée par la chute des feuilles et la nomination des différents prix Nobel, à Stockholm, depuis la création en 1895 par Alfred Nobel de cette distinction décernée chaque année dans six catégories : Physique, chimie, physiologie ou médecine, littérature, paix et sciences économiques. Faut-il rappeler que le Nobel  récompense des personnes pour leurs contributions exceptionnelles dans leur domaine d’études. Obtenir cette récompense prestigieuse est un véritable défi. C’est dire notre fierté de sarthois de découvrir qu’en 1909 le prix Nobel de la paix a été décerné à Paul d’Estournelles-de-Constant, ancien député puis sénateur de la Sarthe. L’occasion aujourd’hui de lui adresser un petit clin d’œil, d’outre-tombe, comme dirait Chateaubriand.

Rappelons tout d’abord que ce diplômé de l’école des Langues Orientales, qui était aussi baron de Constant de Rebecque, est né à la Flèche le 22 novembre 1852 et qu’il est mort à Paris le 15 mai 1924. Dans sa jeunesse, après avoir été un brillant élève au Lycée Louis-Le-Grand à Paris, le jeune homme obtint son baccalauréat ès lettres au lycée français d’Athènes, suivi d’une licence en droit à Paris . Il intègre alors le ministère des affaires étrangères et devient élève-consul, puis un peu plus tard secrétaire d’ambassade à Londres et en 1884 secrétaire de l’ambassade de France à La Haye. Auteur d’un ouvrage « La politique française en Tunisie » l’Académie française le récompensa par le Prix Thérouanne. L’association littérature-diplomatie a toujours été chose courante dans notre pays, je pense en particulier à   Alexis Léger, ancien secrétaire général du Quai d’Orsay, avec les rangs et dignité de premier des ambassadeurs de France, plus connu sous son nom de poète de Saint-John Perse. Le futur ministre plénipotentiaire, chargé d’affaires à Londres, Paul d’Estournelles-de-Constant, s’inscrivait ainsi dans une longue lignée qui compta dans ses rangs d’illustres auteurs : Chateaubriand, Stendhal, Claudel, Morand, Giraudoux, et plus récemment Romain Gary ou encore Jean-Christophe Ruffin. A voir ces noms illustres je regrette un peu plus ma nomination manquée de consul honoraire du Mali, pour cause de rupture des relations diplomatiques entre Paris et Bamako, j’aurais alors rejoins, en toute modestie, cette cohorte de gens de plume. Tous ont largement contribué, entre belles-lettres et littérature, à la promotion et au rayonnement d’une diplomatie culturelle française à travers le monde, une belle et noble mission.

C’est en 1895 que ce père de cinq enfants décide d’entrer en politique et qu’il est candidat aux élections législatives où il est élu, député de la circonscription de Mamers, place qu’il cèdera trois ans plus tard à Joseph Caillaux un des personnages politiques les plus influents de 1912 à1944. Les français doivent à ce manceau la création de l’impôt sur le revenu alors qu’il était ministre des finances de Clémenceau, mais aussi d’avoir été un des précurseurs de la lutte contre les paradis fiscaux et chef du gouvernement. Tout le monde a encore en mémoire l’assassinat par son épouse, Henriette,  de Gaston Calmette alors directeur du Figaro qu’elle jugeait responsable de la violente campagne de presse contre son mari.   Paul d’Estournelles-de-Constant est ensuite élu sénateur et réélu en 1909 et 1920. Entre temps il a aussi beaucoup œuvré en faveur de l’arbitrage, du désarmement et de la paix, cherchant inlassablement le règlement pacifique des conflits internationaux par la médiation. Accessoirement, si je puis dire, il aida aussi beaucoup Léon Bollée, principal soutien de Wilbur Wright pionnier de l’aviation dans ses expérimentations aéronautiques. Le prix Nobel de la paix, qu’il reçut conjointement avec le député belge Auguste Beernaert, visait à récompenser les efforts des deux hommes dans la construction du droit international, ainsi que l’organisation des conférences de La Haye de 1899 et 1907 qui déboucha sur la création d’une cour permanente d’arbitrage, toujours très active aujourd’hui.

Paul d’Estournelles-de-Constant, était le troisième français à recevoir un prix Nobel après Frédéric Passy et Louis Renault. Fervent opposant à la politique coloniale, favorable à un rapprochement franco-allemand et ardent défenseur du modèle de la démocratie américaine dans le monde, il s’intéressait aussi aux domaines de l’art et de l’écriture et comptait parmi ses amis Ernest Renan, Paul Bourget et Paul Valéry ou encore le philosophe Henri Bergson, tout en entretenant une vive amitié avec le peintre Claude Monet. Il est mort à l’âge de 71 ans et ses cendres sont déposées dans la sépulture familiale au cimetière de Clermont-Créans, près de La Flèche.

L’attribution du prix Nobel de la Paix à un sarthois en 1909 aura été l’occasion d’un bref retour en arrière, le temps d’une chronique. Il est important d’exhumer ainsi périodiquement de notre histoire de France certains personnages qui ont marqué le département de leur empreinte. Que l’on ait ainsi honoré, voici un peu plus d’un siècle, de la plus prestigieuse des récompenses Paul d’Estournelles-de-Constant pour ses efforts en faveur de la paix, alors que le canon tonne de nouveau en Europe et au Proche-Orient, et sans doute demain dans le Pacifique, est plus que flatteur pour la mémoire collective sarthoise, dont chacun d’entre nous est un peu le dépositaire et le gardien.

Jean-Yves Duval, journaliste écrivain

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